samedi 29 mars 2008

William Chambers

Mais de toutes les constructions aquatiques des chinois les plus extraordinaires, et en même temps les plus agréables, sont celles qu'ils nomment Hoie-ta, ou habitations submergées. Des salons et des cabinets bâtis entièrement sous l'eau composent ces édifices ; leurs murailles sont incrustées des plus beaux coquillages, mêlés de branches de corail et de plantes marines, aussi variées dans leurs formes que singulières dans leurs espèces. Ces décorations tapissent des niches bizarres dans lesquelles sont placées, chacune à son rang, les statues de Fun-Shan dieu des vents, et de Long Wong roi de l'océan oriental, et celles de toutes les divinités inférieures de l'humide élément. Des compartiments de jaspe, d'agate, et des plus curieuses madrépores de Haynan, forment le plancher des appartements. Le plafond composé de glaces admet la lumière au travers de l'eau qui le couvre, ainsi que la fabrique entière, à la hauteur de plusieurs pieds. Ces glaces brillantes de mille couleurs, sont jointes avec solidité, et ont assez de force pour résister à la pesanteur du fluide qui presse toute leur surface. C'est une singularité fort amusante d'observer, à travers le cristal du lambris, l'agitation de l'eau, le passage des navires, et les jeux des oiseaux aquatiques ou des poissons qui nagent au-dessus du spectateur. Les habitations submergées servent au même usage que les Miau-Ting dont nous avons déjà parlé ; on y prend le frais pendant la chaleur du jour, et les mandarins en font des retraites voluptueuses, consacrées aux festins et à l'amour.

William Chambers, Dissertation sur le jardinage de l'Orient (1772)