Après Last Days, vous aviez dit envisager un film plus commercial, produit par Hollywood. Pourquoi y avoir renoncé ?
J'y ai sans doute pensé un moment, mais on ne m'a rien proposé d'intéressant et j'avançais en parallèle sur des projets que je voulais développer à très petite échelle. A une époque, j'étais séduit par l'idée de travailler à l'intérieur du système hollywoodien pour y tenter des expériences, comme le remake plan par plan de Psychose, par exemple, mais je ne raisonne plus comme ça. Je n'ai pas choisi de tourner Paranoid Park pour rester indépendant ou pour creuser une veine expérimentale, mais simplement parce que j'ai été captivé par le roman de Blake Nelson (1). Il me permettait d'approcher ce « parc » où les jeunes font du skate à Portland, un endroit qui m'attire et m'intrigue depuis que j'habite cette ville. Le skate est un univers très singulier, une microsociété d'« outsiders » qui génère sa propre culture visuelle et musicale.
Comme à l'époque d'Elephant, vous avez choisi des acteurs non professionnels...
Plus ça va, plus j'aime travailler avec des non-professionnels parce qu'ils offrent quelque chose de très pur, de très instinctif. Et j'ai toujours été attiré par les jeunes acteurs et l'énergie qu'ils communiquent à mon cinéma. Le tournage est un moment de leur adolescence où ils sont amenés à se révéler. Pour Elephant, j'avais lancé une recherche dans les lycées de Portland. Cette fois, je suis passé par MySpace, c'est le meilleur moyen de rencontrer des ados aujourd'hui. Des ados passionnés.
Pourquoi avoir choisi le chef opérateur Chris Doyle, connu pour ses collaborations avec Wong Kar-wai ?
J'avais déjà travaillé avec lui sur Psycho. J'aime la souplesse et la liberté de son travail. Nous nous comprenons et nous avons pu prendre des risques, nous laisser porter par le mouvement des corps, le rythme, la fluidité des gestes. Nous nous sommes beaucoup inspirés des films de skate, visuellement passionnants.
Propos recueillis par Laurent Rigoulet pour Télérama, publiés le 28 octobre 2007