Ainsi Arnulf Rainer (1957-1960) : voulant rendre hommage à l'oeuvre de son ami Rainer, après l'avoir filmé dans son atelier et tenté toutes sortes d'expériences, Kubelka finit par faire un film sans image du tout (ou plutôt avec seulement l'horizon, le fondement de toute image), soit une succesion soigneusement structurée de photogrammes blancs ou noir, accompagnés ou non de son - utilisant ainsi les quatre figures audio-visuelles les plus simple de l'histoire du cinéma. Il n'est pas abusif de voir là l'équivalent du tableau en blanc de Malévitch et le premier de ces films à clignotement, de ces agencements de photogrammes monocolores (chaque photogramme, d'une durée, donc de 1/24° de seconde - étant pratiquement d'une couleur différente) que produiront peu après Tony Conrad (The Flicker, 1965) ou Paul Sharits (N:O:T:H:I:N:G:, 1968).
Je pense qu'Arnulf Rainer est le film le plus proche de l'essence du cinéma qui existe parce qu'il emploie les éléments qui constituent le cinéma dans leur forme la plus radicale et la plus pure. C'est la lumière et l'absence de lumière, c'est le son et l'absence de son et leur événement dans le temps.
Dominique Noguez